vendredi 18 décembre 2009

LES FANTOMES DE MARSEILLE PAGNOL



Ce titre d'une chanson de Guidoni renvoie ici aux actrices qui ont inspiré le cinéaste Marcel Pagnol et qui sont au coeur de ses films néo-réalistes. Si on enlève les excès d'histrionisme de ses comiques vedettes (Raimu, Fernandel) ainsi que de trop franches séquences de pagnolades que réclamait le gros du public, on obtient les merveilleux moments où brillent de jeunes femmes aimées par le réalisateur. Sauvageonnes séductrices ou modestes citadines, filles à parents terribles prises aux pièges des garçons qui les charment et les abandonnent, elles incarnent une féminité nouvelle sur les écrans de cette époque.



Certes Orane Demazis formée au muet conserve des traits expressionistes parfois trop marqués, mais c'est justement ce dramatisme qui souligne le passion de la petite poissonière aux amours sacrifiés. La déambulation de Fanny dans les rues de Marseille, alors qu'elle vient de s'entendre confirmer sa grossesse illégitime est un grand moment d'émotion et de simplicité, originalement capté par un travelling depuis le tramway. Celle-ci la conduit jusqu'à la cathédrâle où elle supplie la vierge de lui donner du courage. Peu de dialogues, un traitement naturaliste, un sommet de lyrisme.



Je souligne ici par ailleurs que Pierre Fresnay et Orane Demazis illustrent un des plus beaux couples des années trente à l'écran.



Josette Day sera sa compagne durant l'occupation et il placera chez Cocteau qui en fait l'héroïne merveilleuse de "La Belle et la Bête". Dans "La fille du puisatier" elle est une admirable fille modèle se laissant prendre aux loopings d'un aviateur qui dans son audacieux maillot de corps prend ici des poses sur sa moto qui n'auraient justement pas déplu à Cocteau...



Exception faite à sa faiblesse pour les blondes, Ginette Leclerc rescapée du "Corbeau" de Clouzot est une "Femme du boulanger" mélancolique qui fuit dans les bras d'un gitan. Boudeuse et sensuelle, rondelette et blanche comme de la pâte à pain, cette brune figure aussi parmi les actrices auxquelles ma mère s'identifiait!



Avec Jacqueline Bouvier ( pas celle de Kennedy, mais la future Mme Pagnol) il trouve sa muse sans accent ( dommage pour la perte de charme provençal, car on a du mal à se figurer une méridionale parlant pointu!). Elle est une éblouissante "Naïs craignant les colères de son père et soupirant sous le clair de lune avec le fils de la patronne!





Plus tard elle campera "Manon des sources" la fille des collines à la chevelure d'or que tout un village maudit. On imagine quelques années plus tard ce que Bardot aurait donné dans ce rôle taillé pour elle! Heureusement il y eut Emmanuelle Béart pour ressuciter la fantômette des collines.

Aucun commentaire: